|
|
|||||||
JD1119 |
||||||||
|
||||||||
CANADA |
||||||||
PROVINCE DE QUÉBEC |
||||||||
DISTRICT DE |
QUÉBEC |
|||||||
|
||||||||
N° : |
||||||||
|
||||||||
|
||||||||
DATE : |
17 octobre 2002 |
|||||||
______________________________________________________________________ |
||||||||
|
||||||||
SOUS LA PRÉSIDENCE DE : |
L’HONORABLE |
LOUIS DE BLOIS, j.c.s. |
||||||
______________________________________________________________________ |
||||||||
|
||||||||
|
||||||||
JEAN-FRANÇOIS LAFORGE |
||||||||
Appelant |
||||||||
c. |
||||||||
VILLE DE L'ANCIENNE-LORETTE |
||||||||
Intimée |
||||||||
|
||||||||
|
||||||||
______________________________________________________________________ |
||||||||
|
||||||||
JUGEMENT |
||||||||
______________________________________________________________________ |
||||||||
|
||||||||
[1] Le 29 août 2001, le juge de première instance a rendu une décision trouvant l'appelant coupable de l'infraction suivante :
« Article 65 : Pour conduire un véhicule routier sur un chemin public, sur les chemins soumis à l'administration du ministère des Ressources naturelles ou entretenus par celui-ci, sur un chemin privé ouvert à la circulation publique des véhicules routiers ainsi que sur les terrains de centres commerciaux et autres terrains où le public est autorisé à circuler, une personne doit être titulaire d'un permis de la classe appropriée à la conduite de ce véhicule tel que déterminé par règlement et comportant, le cas échéant, les mentions prescrites par ce règlement. À la section des conditions attachées au permis, soit l'article 93.1, du Code de sécurité routière, l'article se lit comme suit : le titulaire d'un permis de conduire doit, selon la fréquence prévue par règlement, payer à la Société les frais fixés par règlement, les droits fixés par règlement et revalorisés, le cas échéant, conformément à l'article 151.4 de la Loi sur l'assurance automobile ainsi que la contribution d'assurance fixée en vertu de l'article 151 de cette loi et revalorisée, le cas échéant, conformément à l'article 151.4 de cette loi, au cours de la période déterminée par règlement.
À défaut de paiement au cours de cette période, le titulaire ne peut, à compter du premier jour suivant la date d'expiration de cette période et sans autre avis de la Société, conduire un véhicule routier. »
[2] Le défendeur a été intercepté au volant de son véhicule automobile, à l'intersection des rues Notre-Dame et St-Jacques à l'Ancienne-Lorette, après que les policiers aient constaté, à la suite d'une vérification au C.R.P.Q., qu'il ne détenait pas de permis valide, le 15 novembre 2000. La preuve révèle, en effet, que selon les fichiers de la Société de l'assurance automobile du Québec (ci-après appelée la SAAQ), le défendeur n'était pas titulaire d'un permis de conduire à cette date.
[3] L'appelant invoque, dans son avis d'appel, que la défense présentée par l'appelant n'était non pas l'erreur de droit mais plutôt l'erreur de faits.
[4] Et il ajoute dans son avis d'appel que les faits mis en preuve par l'appelant au soutien de cette défense, faits qui ont tous et chacun été retenus par l'honorable juge Paulin Cloutier sont en résumé les suivants :
i) il a été intercepté en 1998 pour excès de vitesse ;
ii) au cours des années 1997 à 1999, il a fait des transactions et enregistré à son dossier de conduite un renouvellement d'immatriculation ;
iii) il a consenti à des enquêtes relatives à son dossier de conduite auprès de la Société de l'assurance automobile du Québec ;
iv) il n'a reçu au cours des années 1995 à 2000 aucun avis de renouvellement de son permis de conduire ;
v) le permis de l'appelant était sur support de plastique avec photo, il était indiqué sur ledit permis que ce dernier était valide jusqu'au 15 juin 2001 ;
vi) il n'a jamais été avisé par la Société de l'assurance automobile du Québec de l'inexistence de son permis de conduire ;
vii) enfin, comme motif qui résume tous les motifs ci-haut énumérés, l'appelant plaide que l'ensemble des faits retenus par le juge et les circonstances de l'affaire, telles que reprises à même les motifs de la décision, démontrent que la preuve présentée par l'appelant était de nature à soulever un doute raisonnable quant à sa culpabilité.
[5] En effet, la preuve justifie amplement l'erreur de faits commise par l'appelant qui croyait sincèrement détenir un permis de conduire valide.
[6] Le juge de première instance résume bien l'état des faits qui ont donné ouverture à la présente plainte, il écrit :
« Le défendeur s'est fait entendre lors du procès. Il a expliqué qu'il a fait l'objet d'une sanction en 1997 pour ne pas avoir réglé en temps utile une amende. Il n'avait pas reçu l'avis de sanction émis à ce sujet. Il s'est fait intercepter par des policiers de la Sûreté du Québec qui lui ont émis un constat d'infraction. Il a alors immédiatement réglé cette amende après l'interception. Il a contesté le constat. À cette époque, le défendeur devait recevoir un avis de renouvellement de son permis de conduire. Cependant, compte tenu de la sanction qui lui avait été imposée, aucun avis de renouvellement ne lui a été transmis. Il n'a pas pris conscience que les droits afférents à son permis de conduire devaient être payés. Il croyait qu'à la suite du paiement de l'amende tout était régularisé. Sur la question de l'avis que l'appelant prétend ne pas avoir reçu, les articles 31.1 et 93.1 du Code de sécurité routière sont de toute évidence très clairs sur le sujet. »
Et le juge de première instance ajoute :
« Sur la question de savoir si l'attente d'un avis de renouvellement par un titulaire d'un permis de conduire ou d'une immatriculation pouvait constituer une défense de diligence raisonnable, le soussigné s'est rangé du côté des jugements de Bouchard C. Ville Bélair et de Ville de Vanier C. Simard. Pour le soussigné, ce comportement ne constitue pas de la diligence raisonnable en ce qu'il prévaut à plaider l'ignorance de la loi, ignorance qui ne constitue pas une défense reconnue par notre droit. »
[7] L'appelant qui soutient qu'il a été victime d'une erreur de faits doit pour ce faire, démontrer et faire une preuve de diligence raisonnable, une preuve qui sème un doute dans l'esprit du Tribunal quant à la perpétration de l'infraction reprochée. Tout ce que l'appelant soutient c'est qu'il n'a pas reçu d'avis, il plaide l'erreur de faits. Or, le juge de première instance conclut, sans équivoque, sur ces prétentions dans les termes suivants :
« À l'égard de la présente affaire, la Cour retient également le jugement dans Salomon c. La Reine, relativement à l'appréciation du témoignage de la personne qui dépose devant elle. La Cour doit tenir compte de la profession, de l'instruction, des capacités intellectuelles, de l'expérience et de sa formation pour apprécier son témoignage ou ses explications. Ainsi, cet élément peut devenir important lorsque la Cour a décidé du caractère raisonnable de la croyance erronée d'un justiciable tel qu'il a été traité dans l'affaire Jorgensen[1] par l'honorable juge Lamer et par la Cour d'appel de l'Ontario dans l'affaire Cancoil Thermal Corp[2] . »
[8] Et le juge continue :
« Dans la présente affaire et pour les raisons mentionnées précédemment, la Cour refuse de reconnaître la seule attente d'un avis de renouvellement comme étant une preuve de diligence raisonnable, acceptable à l'encontre de l'infraction que l'on reproche au défendeur. »
[9] Or, le rôle de la Cour supérieure en appel est limité (article 286 C.p.P.) : elle se justifie uniquement :
a) si le jugement est déraisonnable eu égard à la preuve ;
b) si justice n'a pas été rendue ;
c) si une erreur de droit a été commise, à la condition que celle-ci aie eu un effet déterminant sur le jugement.[3]
[10] En matière de crédibilité, notre intervention est rare, le juge de première instance jouissant d'une position privilégiée à cet égard [4]:
[11] Ces principes sont fort bien résumés dans le texte suivant :
« … une Cour d'appel a un pouvoir très limité. La Cour d'appel ne doit pas réévaluer la preuve, refaire le procès pour changer les conclusions rendues par le juge du procès. Le rôle d'une Cour d'appel est beaucoup plus modeste que ça. La Cour d'appel doit uniquement s'enquérir, en examinant bien entendu la transcription, de l'existence des faits dans la preuve qui permettraient au juge du procès de conclure dans le sens où il a rendu sa décision. Et c'est encore récemment ce que rappelait la Cour suprême du Canada dans l'affaire de R. c. BURNS, (1994) 80 C.C.C. (3d), page 193, aux pages 198 et 199. La Cour d'appel doit examiner la preuve, doit l'évaluer mais uniquement pour s'assurer que la preuve faite en première instance supporte les conclusions rendues par le juge du procès. Une Cour d'appel ne doit pas substituer son appréciation de la preuve à celle du premier juge. » (Yvon Schinck c. Le Procureur général du Québec, 17 janvier 1997, 760-36-000088-966, Jean-Guy Boilard, pp. 6-7.)
[12] L'appelant invoque principalement une erreur de faits qu'aurait commise le juge de première instance. La Cour ne croit pas devoir intervenir dans cette décision qui, de toute évidence, ne paraît aucunement déraisonnable dans les circonstances.
[13] De plus, l'erreur de faits invoquée par l'appelant dans son avis d'appel ne donne pas ouverture au remède demandé.
[14] POUR CES MOTIFS, LA COUR :
[15] REJÈTE l'appel de l'appelant avec dépens suivant la réglementation.
|
||
|
__________________________________ LOUIS DE BLOIS, j.c.s. |
|
|
||
M. Jean-François Laforge 5055, boul. Wilfrid Hamel, bureau 150 Québec (Québec) G2E 2G6 Appelant |
||
|
||
|
||
Me Serge Morin Procureur de l'intimée |
||
|
||
Date d’audience : |
18 février 2002 |
|
[1]
Jorgensen et al c. R., (1995) 4 R.C.S. 55
[2] R. c. Cancoil Thermal Corp et al, (1986) 52 C.R. (3d) 188 p. 199
[3]
Québec c. Scierie Mont-Laurier Inc., J.E. 97-254 (C.A.)
Québec c. Herman Veilleux Inc., J.E. 92-1696 (C.A.)
[4]
R. c. W(R), (1992) 2 R.C.S. 122
R. c. R(D), (1996) 2 R.C.S. 291