Protection de la jeunesse — 061479

2006 QCCQ 16923

JJ0296

 
 COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE […]

« Chambre de la jeunesse »

N° :

525-62-006333-062

 

DATE :

8 décembre 2006

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : L’HONORABLE ANN-MARIE JONES, J.C.Q.

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Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec

Poursuivante

c.

X

Défendeur

 

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JUGEMENT

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[1]           Le défendeur se voit reprocher trois contraventions à l’article 20 de la Loi sur les maîtres mécaniciens en tuyauterie (L.R.Q. c. M-4).

[2]           Le poursuivant dépose en preuve des photocopies du journal « Courrier A » éditions du 12 septembre et du 26 septembre 2004, concernant les deux premiers chefs.  En ce qui a trait au troisième chef, il dépose copie d’une publicité du site Internet […], imprimée le 29 septembre 2004.

[3]           Les annonces publicitaires déposées sous les cotes P-2 et P-3 se lisent comme suit :

Courrier A :

« Service homme à tout faire 7/7, rénovations, plomberie, travaux divers, […] »

Site Internet […] :

« Homme à tout faire pour tout genre rénovation, plomberie, camion tout équipé. Si vous désirez un travail bien fait et proprement. Service rapide et courtois 7 jours, service 24 heures Cellulaire : […]

Contacter : X »

[4]           Cette preuve a été complétée par le dépôt, conformément à l’article 62 du Code de procédure pénale (L.R.Q. c. P-25.1), des rapports d’infraction général qui attestent que le défendeur n’était pas membre en règle de la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec aux dates des infractions reprochées.

[5]           Le défendeur n’était pas représenté lors du procès. Il a témoigné qu’en 2004, il était étudiant et travaillait comme vendeur pour la compagnie A située sur la rue A à ville A. Il a déposé une lettre de cet employeur attestant qu’il a suivi une formation en technique de vente dans le domaine de la rénovation.

[6]           M. X a expliqué que son travail consistait à recruter des clients pour la compagnie A. Il recevait des appels de clients potentiels, les rencontrait et préparait les bons de commande. Par la suite, le travail de rénovation était effectué par les ouvriers de [Compagnie A], compagnie  détenant une licence d’entrepreneur.

[7]            M. X reconnaît avoir payé pour les annonces publicitaires soumises en preuve, dans le Courrier A et sur le site Internet […]. Il reconnaît également que le numéro de téléphone apparaissant dans ces annonces publicitaires est  celui de son  téléphone cellulaire personnel.

ANALYSE ET CONCLUSION

[8]           La loi sur les maîtres mécaniciens en tuyauterie (L.R.Q. c. M-4) définit  le terme « maître mécanicien en tuyauterie » de la façon suivante :

« 1.  Dans la présente loi, les mots et expressions suivants, à moins que ce ne soit incompatible avec le contexte, doivent être interprétés comme suit : 

(…)

5 - « Maître mécanicien en tuyauterie » signifie une personne qui :

 

a)    fait affaires comme entrepreneur en installation de tuyauterie;

 

b)    pour autrui, exécute ou fait exécuter des travaux d’installation, de réfection, de modification ou de réparation portant sur toute installation de tuyauterie;

 

(…) ».

 

[9]           L’article 20 de la Loi sur les maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec (L.R.Q., c. M-4) stipule : 

« 20.  Quiconque n’est pas membre en règle de la Corporation est passible d’une amende de 500$ à 1000$ dans le cas d’un individu et d’une amende de 1000$ à 2000$ dans le cas d’une personne morale si :

1.  Elle exerce au Québec comme maître mécanicien en tuyauterie;

2.  Elle laisse entendre, fait présumer ou croire erronément qu’elle a le droit d’exercer le métier de maître mécanicien en tuyauterie ou usurpe le titre de maître mécanicien en tuyauterie ou d’entrepreneur en tuyauterie. »

[10]        Le poursuivant soumet que les annonces publicitaires contreviennent à l’article 20, paragraphe 2, de la loi puisqu’elles laissent entendre, font présumer ou croire que le défendeur est membre de la corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie. Selon le poursuivant, le texte des publicités laisse entendre que le défendeur peut légitimement pratiquer le métier de plombier alors que ce métier relève de la compétence des maîtres mécaniciens en tuyauterie, licence qu’il ne détient pas.

[11]        De son côté, le défendeur soumet qu’il n’a pas exercé le métier de plombier et qu’il n’avait pas l’intention d’effectuer de travaux de plomberie. Il plaide qu’il agissait dans la légalité puisqu’il référait les clients à son employeur, [Compagnie A], dont les ouvriers détenaient les licences nécessaires.

[12]        Il s’agit en l’espèce d’infractions de responsabilité stricte, suivant les critères énoncés dans l’arrêt Sault Ste-Marie[1] et pour lesquelles la poursuite n’a pas à prouver l’intention ou l’état d’esprit coupable du contrevenant. En effet, il lui suffit de faire la preuve de la commission de l’infraction, hors de tout doute raisonnable. 

[13]        Il est établi que le défendeur n’est pas plombier et qu’il ne détient pas de licence de maître-mécanicien en tuyauterie. La question à trancher est à savoir si une personne raisonnable pouvait penser que la personne ayant fait passer les annonces détenait une licence pour effectuer des travaux de plomberie, c’est-à-dire une licence de maître mécanicien en tuyauterie.

[14]        En l’espèce, le Tribunal conclut que la personne raisonnable qui lisait une de ces   annonces pouvait s’attendre à ce que le défendeur soit en mesure d’effectuer des travaux de plomberie. De plus, lorsque le défendeur emploie le terme « homme à tout faire », au singulier, et qu’il donne le numéro de téléphone de son cellulaire personnel, il laisse entendre qu’il travaille seul. En l’instance, le défendeur aurait dû clarifier qu’il agissait pour et au nom de [Compagnie A].

[15]        Comme il s’agit d’une infraction de responsabilité stricte, l’intention du défendeur ne doit pas être tenue en compte. Par conséquent, même si le défendeur n’avait pas l’intention d’effectuer des travaux de plomberie, le fait de faire publier des annonces qui laissaient croire erronément qu’il avait le droit d’exercer le métier de maître mécanicien en tuyauterie engage sa responsabilité pénale.

[16]        Les éléments constitutifs de l’infraction ayant été démontrés hors de tout doute raisonnable, le défendeur est déclaré coupable sur chacun des trois chefs.

[17]        L’amende prévue à l’article 20 de la loi est de 500 $ à 1 000 $ par chef pour une première infraction. Toutefois, l’article 231 du Code de procédure pénale prévoit que le montant maximum auquel un mineur peut être condamné est de 100 $. Dans Protection de la jeunesse – 726[2], la Cour supérieure a conclu que lorsque l’amende minimale prévue à une loi provinciale est supérieure à 100 $, l’adolescent doit se voir imposer le montant de 100 $ d’amende, représentant « l’amende maximum-minimum prévue par la loi ». De plus, lorsqu’il y a plusieurs chefs d’accusation, l’amende totale peut dépasser ce seuil de 100 $.[3]

[18]        En l’instance, puisque le défendeur est étudiant le poursuivant ne demande pas les frais. Le défendeur est donc condamné à 100 $ d’amende sur chacun des trois chefs, pour un total de 300 $ d’amende. 

[19]        POUR TOUS CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[20]        DÉCLARE le défendeur coupable sur chacun des trois chefs d’infractions;

[21]        CONDAMNE le défendeur à payer une amende de 100 $ sur chacun des chefs, sans frais;

[22]        ACCORDE au défendeur un délai de 120 jours pour payer les amendes totalisant 300 $.

 

 

 

 

 

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Ann-Marie Jones, J.C.Q.

 

Me François Xavier Robert

(Procureur de la poursuivante)

 

 

Date d’audience :

8 septembre 2006

 



[1] R. c. Sault Ste-Marie [1978] 2 R.C.S. 1299.

[2] Protection de la jeunesse- 726, 500-36-000384-944, J.E.95-1512 (C.S.), SOQUIJ AZ-95021615.

[3] Protection de la jeunesse-246, 500-10-000187-854, J.E. 87-252 (C.A.), SOQUIJ AZ-87011080.