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JL1755 |
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COUR DU QUÉBEC |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT |
D’ABITIBI |
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LOCALITÉ |
DE VAL-D’OR |
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Chambre criminelle et pénale |
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N° : |
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DATE : |
4 février 2003 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
MONSIEUR LE JUGE DENIS LAVERGNE, J.C.Q. |
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RÉGIS CÔTÉ, demeurant au 677, de la Rivière, Val-d’Or (Québec) J9P 6K3 |
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Requérant |
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c. |
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MUNICIPALITÉ DE LA VILLE DE MONT-LAURIER, à l’attention de Me Jacques Lauzon, 726, de la Madone, Mont-Laurier (Québec) J9L 1S9 |
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Intimée |
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JUGEMENT SUR DEMANDE DE CHANGEMENT DE DISTRICT (Art. 176, Code de procédure pénale (L.R.Q., chap. C-25.1)) |
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[1] Monsieur Régis Côté, un citoyen de Val-d’Or, à qui l’on reproche une infraction commise à Mont-Laurier, district de Labelle, demande que l’instruction en soit transférée à Val-d’Or, district d’Abitibi.
[2] La singularité de cette demande, par ailleurs assez simple, tient au fait que le poursuivant n’est pas le Procureur général du Québec qui dispose ici et là sur tout le territoire de la province de bureaux et de procureurs pour le représenter dans les différents Palais de justice, mais un poursuivant privé, au sens de l’article 9 du Code de procédure pénale, en l’occurrence, la Municipalité de Mont-Laurier.
[3] Aux termes des articles 576 et suivants de la Loi sur les cités et villes (L.R.Q., chap. C.-19) les poursuites pénales pour sanction d’une infraction à une disposition d’un règlement ou d’une résolution d’un conseil municipal peuvent être intentées par la municipalité.
[4] À l’audience du 20 janvier 2003, le Substitut du procureur général, agissant en quelque sorte comme représentant du procureur de la municipalité, fait valoir qu’il s’agit d’une « affaire municipale » à l’égard de laquelle la Cour du Québec n’aurait pas compétence. En outre, une lettre au dossier du procureur de la Municipalité renvoie à une décision de notre Cour qui refuserait le 25 novembre 2002, dans les mêmes circonstances, le transfert dans le district judiciaire de Terrebonne de l’instruction d’une affaire émanant du district de Labelle.
[5] Sur demande de la Cour, le procureur de la Ville de Mont-Laurier fait valoir dans une lettre du 23 janvier 2003 que : « Dans cette éventualité où la poursuite ne serait pas continuée par un Substitut de Val-d’Or, il faudrait alors que la Ville de Mont-Laurier engage des frais disproportionnés (vacation du soussigné pour l’audition de ce dossier ou désignation d’un poursuivant ad hoc) ou se résigne au retrait de la plainte ».
[6] D’une part, il ne s’agit pas d’une affaire « municipale » ou de Cour municipale comme on a pu le dire dans la décision à laquelle le procureur de Mont-Laurier renvoie. L’article 30 de la Loi sur les Cours municipales (L.R.Q., chap. C-72.01) confère compétence exclusive au juge municipal sur toute infraction aux dispositions de la Charte de la municipalité, des règlements, d’une résolution ou d’une ordonnance de la municipalité. De toute évidence, la présente affaire ne tombe pas sous le ressort d’une Cour municipale. Il peut bien s’agir d’un règlement municipal portant sur la sécurité routière, en l’occurrence, l’interdiction de franchir une ligne double continue, mais c’est la Cour du Québec, district de Labelle (Mont-Laurier) qui est saisie de la poursuite en vertu du Code de procédure pénale (art. 1, 2 et 3).
[7] D’autre part, il n’y a, au Code de procédure pénale, aucun fondement légal, qui empêche l’application des articles 176 et 177 au sujet du transfert de district judiciaire dans les cas de règlement municipaux dont la municipalité décide la poursuite des infractions en en saisissant la Cour du Québec. En vertu de la Loi sur les tribunaux judiciaires (L.R.Q., chap. T-16), la compétence de la Cour du Québec s’étend sur tout le territoire du Québec.
[8] L’article 176 du Code de procédure pénale énonce :
« Sur demande d’une partie, un juge peut, dans l’intérêt de la justice, ordonner que l’instruction ait lieu dans un autre district. Le greffier transmet alors le dossier au greffe du tribunal compétent dans le district désigné dans l’ordonnance. »
[9] En fait, et compte tenu des observations du procureur de la municipalité, l’affaire soulève uniquement l’exercice de la discrétion que les articles 176 et 177 du Code de procédure pénale confèrent à la Cour d’ordonner ou non le changement de district dans l’intérêt de la justice.
[10] En principe, le choix du district judiciaire appartient au poursuivant. Plus particulièrement, il peut s’agir :
– le district où l’infraction est alléguée avoir été commise;
– le district où le défendeur a sa résidence ou son siège social
ou l’un des ses établissements;
– le district de la détention du défendeur, le cas échéant;
(art. 142, Code de procédure pénale).
[11] Les articles 176 et 177 portant sur le changement de district s’inspirent de la vieille procédure de changement de venue en droit criminel qui permet à un accusé d’obtenir le changement du district de l’instruction de son procès dans les cas où il démontre l’impossibilité soit de réunir un jury impartial, soit d’obtenir un procès juste et équitable.
[12] Bien évidemment, il ne s’agit pas de cela ici. Et il faut adapter les articles 176 et 177 au contexte particulier du droit et de la procédure de la législation pénale.
[13] L’article 176 constitue indubitablement une exception à la règle générale de l’article 142. Par ailleurs, cette disposition ne précise pas les motifs ni les conditions d’octroi d’une ordonnance de changement de district judiciaire.
[14] De manière générale, l’expérience indique que ce type de requête fait rarement l’objet de contestation. Il est vrai que, dans ces cas, elle implique plus souvent qu’autrement le Substitut du procureur général de la province de Québec, présent dans tous les Palais de justice où ont lieu les poursuites pénales.
[15] En outre, le Code de procédure pénale met en place un régime souple d’administration des preuves de manière, entre autres, à éviter le plus possible le déplacement de témoins et de mitiger les coûts. Ainsi, l’article 62 stipule que tout constat d’infraction ainsi que tout rapport d’infraction peut tenir lieu du témoignage de l’agent de la paix chargé de l’application de la loi.
[16] Dans la présente affaire, rien n’indique qu’il puisse en être autrement. Le constat évoque une infraction à la sécurité routière. Que cette infraction soit à l’encontre d’un règlement municipal de la Ville de Mont-Laurier ne change rien à la procédure pénale applicable.
[17] La Cour ne disconvient pas de l’inconvénient, essentiellement, d’après le dossier, au plan des coûts, que soulève le déplacement de l’instruction dans un autre district judiciaire. Mais c’est précisément la même raison qu’invoque monsieur Côté pour que l’affaire soit entendue dans le district d’Abitibi.
[18] Les municipalités possèdent un vaste pouvoir réglementaire dans divers champs d’activités, susceptibles de donner lieu à un contentieux pénal et à des contestations qui se prêteront mal à ce que l’instruction soit transférée d’un district judiciaire à un autre. La discrétion de la Cour devra alors s’apprécier selon les circonstances propres à chaque cas.
[19] Mais ici, rien n’indique que la preuve du poursuivant ne puisse pas être faite au moyen d‘un simple dépôt du constat, sans nécessiter d’appeler un ou des témoins. Monsieur Côté a le droit de faire valoir une contestation pleine et entière. Aux coût de son déplacement à Mont-Laurier s’ajoute aussi, ce qui diffère de la Municipalité de Mont-Laurier, une éventuelle perte de salaire.
[20] Dans les circonstances, la Cour estime qu’il est dans l’intérêt de la justice que l’affaire soit instruite dans le district judiciaire d’Abitibi (Val-d’Or).
[21] POUR CES MOTIFS, LA COUR :
[22]
ORDONNE le transfert du dossier portant le numéro
560-61-013944-025 du district judiciaire de Labelle (Mont-Laurier) au
district judiciaire d’Abitibi (Val-d’Or) sous le numéro 615-61-009065-027
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[23] ORDONNE QUE l’affaire soit instruite le 9 juin 2003, au Palais de Justice de Val-d’Or, à 9h30 a.m.
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__________________________________ DENIS LAVERGNE, J.C.Q. |
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M. Régis Côté |
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Personnellement |
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Me Richard Duchesneau |
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Représentant Me Jacques Lauzon |
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Procureur de l’intimée |
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