JD 1317

 
 COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

RIMOUSKI

LOCALITÉ DE

 MATANE

« Chambre criminelle et pénale »

N°:

125-61-009966-059

 

 

 

DATE :

Le 30 novembre 2005

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

 

 JULIE DIONNE, Juge de paix magistrat

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VILLE DE MATANE

Poursuivante

 

c.

 

GUILLAUME MORIN-DUBÉ

Défendeur

 

 

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JUGEMENT

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[1]           Le défendeur est accusé d’avoir stationné son véhicule automobile dans un endroit interdit par la signalisation, contrairement à l’article 4.3.19(18) du règlement municipal VM-62 de la Ville de Matane.

LES FAITS

[2]           Suivant la preuve de la poursuite déposée au dossier, le véhicule du défendeur était, le 17 novembre 2004, stationné devant le 455, St-Rédempteur à Matane alors que la signalisation l’interdisait.

[3]           L’agent Sylvain Gauthier a rédigé un constat qu’il aurait signifié le même jour à 14 h 38 à un endroit apparent sur le véhicule.

[4]           Or le défendeur, comme seule défense, affirme qu’il n’a jamais reçu ce constat, qu’il ne l’a jamais retrouvé sur son véhicule.

[5]           Par ailleurs, la preuve documentaire déposée par la poursuite démontre qu’un rappel administratif a été envoyé au défendeur le 25 janvier 2005, soit environ deux mois après la date de la perpétration de l’infraction. La poursuite prétend que ce rappel équivaut à signification. En conséquence, le constat aurait été signifié.

QUESTION EN LITIGE

[6]           La seule question dont le tribunal est saisi consiste à déterminer si le constat d’infraction a bel et bien été signifié. Dans l’affirmative, le défendeur devra être déclaré coupable puisqu’il n’a offert aucune autre défense.

ANALYSE

[7]           Il convient d’abord de faire état des modes de signification permis par le code de procédure pénale qui trouve application ici.

Art. 156.  Toute poursuite pénale débute au moment de la signification d'un constat d'infraction.

Art. 157.  La signification d'un constat d'infraction peut être faite lors de la perpétration de l'infraction. Un double du constat est alors remis au défendeur par le poursuivant ou la personne autorisée à délivrer un constat au nom de celui-ci.

La signification peut également en être faite après la perpétration de l'infraction conformément à la section V du chapitre I.

Art. 157.1.  La signification d'un constat d'infraction peut aussi être faite après la perpétration de l'infraction, par courrier ordinaire.

Dans ce cas, la signification est réputée complétée si le défendeur transmet, à l'égard de ce constat, un plaidoyer, la totalité ou partie du montant d'amende et de frais réclamés ou une demande préliminaire. Elle est, en outre, réputée avoir été faite le jour où ce plaidoyer, ce montant ou cette demande est reçu par le poursuivant.

L'attestation de cette signification peut être faite par la production d'un extrait du dossier indiquant la date de réception du plaidoyer, du montant ou de la demande et certifié conforme par la personne qui en a la garde.

Art. 158.  Dans le cas d'une infraction relative au stationnement d'un véhicule, la signification d'un constat d'infraction peut être faite en déposant un double du constat en un endroit apparent du véhicule.

[8]           On sait pertinemment que pour les infractions relatives au stationnement, les autorités concernées procèdent systématiquement par voie de signification à un endroit apparent sur le véhicule visé. Toutefois, l’article 157.1 du code de procédure pénale prévoit qu’une signification peut être faite par courrier ordinaire après la perpétration de l’infraction.

[9]           Le défendeur prétend qu’il n’a jamais retrouvé le constat sur sa voiture. C’est une défense qui peut être recevable. Il s’agit d’une question de crédibilité que le tribunal doit évaluer. Dans le cas où le tribunal en vient à la conclusion que le défendeur est crédible, il doit mettre de côté la signification du constat faisant en sorte que la poursuite pénale n’existe pas suivant l’article 156 du même code. Ici, la soussignée n’a aucune raison de mettre en doute la crédibilité du défendeur et, en l'absence d'autres éléments, le défendeur devrait être acquitté pour défaut de signification de la procédure.

[10]        La situation présente va plus loin cependant puisqu’un rappel administratif a été envoyé au défendeur. Cet envoi lui a bel et bien été signifié et nous en avons pour preuve son plaidoyer de non-culpabilité reçu par la Ville de Matane peu après l’envoi. Cet envoi peut-il palier à l’absence de signification initiale et être jugé conforme à l'article 157.1 du Code de procédure pénale?

[11]        Il faut d’abord déterminer ce que contenait cet envoi : une lettre informant le défendeur de l’infraction qui lui était reprochée, des explications sur le mode de paiement ou de contestation et une copie du constat d’infraction. On lui aurait fait parvenir ce rappel dans les jours suivants le 25 janvier 2005 et il a par la suite plaidé non coupable, le 7 février 2005.

[12]        Ainsi peut-on assimiler cet envoi à la signification du constat. C’est ce que prétend la poursuite.

[13]        L’article 19 défini ce qu’est la signification :

Art. 19.  La signification d'un acte de procédure prescrite dans le présent code ou dans les règles de pratique peut être faite au moyen de la poste ou par un agent de la paix ou un huissier.

[14]        Sur le sujet, voici ce qui est rapporté au code de procédure pénale annoté[1] :

B. Les buts de la signification

La signification poursuit un objectif d’ordre purement procédural. Elle vise à informer une partie de l’existence d’un litige ou d’une procédure  contre elle…

CONCLUSION

[15]        Ainsi, l’analyse de la preuve est concluante et le tribunal est convaincu que, malgré l’absence de signification initiale, le défendeur a été parfaitement informé de l’existence du constat qui avait été émis contre lui. Pour preuve, il a eu l’opportunité de plaider non coupable le 7 février 2005.

[16]        En conséquence, le tribunal en vient à la conclusion que le constat a été signifié au défendeur par l’envoi du rappel administratif et que cette signification est conforme à l'article 157.1 du Code de procédure pénale.

[17]        EN CONSÉQUENCE, le défendeur est déclaré coupable de l’infraction reprochée.

 

 

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MADAME JULIE DIONNE, J.P.M.

 

Me Marie Andrée Tremblay

Procureure de la poursuivante

 

Guillaume Morin-Dubé

Personnellement

Défendeur

 

 

Date d’audience :

28 septembre 2005

 



[1] Robert LÉTOURNEAU, Code de procédure pénale annoté 2004, 6ième édition, Wilson et Lafleur, p. 46