TRIBUNAL DU TRAVAIL
QUÉBEC
DISTRICT D'IBERVILLE
Nos:500-63-0195-0196-0197-0198-0199-94
Le 25 OCTOBRE 1994
PRÉSIDENTE:
Mme la juge Lise Langlois
COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE
LA SÉCURITÉ AU
TRAVAIL
Poursuivante
c.
DANIEL GINGRAS
Défendeur
Me Claude Lanctôt (Chayer, Panneton, Lessard & Ass)
avocat pour la poursuivante
Me Jean Pierre Robillard (Hébert, Peltier, Tremblay & Ass)
avocat pour le défendeur
JUGEMENT
Le défendeur, Daniel Gingras, est accusé sous
(5) cinq chefs
d'accusation distincts d'avoir les ou vers " les 18 février, 4
février, 21 janvier, 13 janvier 1993, 23 décembre 1992, en tant que
travailleur, obtenu un avantage auquel il savait ne pas avoir de
droit à savoir un chèque de prestation aux montants de 473,76 $,
473,76 $, 469,68 $, 233,31 $, 699,93 $, contrevenant à l'article 463
de la Loi sur les accidents du travail et les maladies
professionnelles (L.R.Q.ch.A-3,001) et commettant ainsi l'infraction
qui y est prévue."
Le procureur de la poursuivante a ensuite
déposé un document
présenté ainsi:
" La présente transcription est une reproduction fidèle et exacte de
l'avis de paiement que la C.S.S.T. a émis le 11/12, 8.15.29/1, 12/2 et
emmagasiné par ordinateur. Elle constitue un document de la commission
au sens de l'article 357 de la Loi sur les accidents du travail et les
maladies professionnelles (L.R.Q. c. A-3,0001)".
Ce document fut accepté sous réserve de
l'objection du procureur
du défendeur quant aux dates auxquelles le défendeur aurait encaissé
les chèques. Tel que convenu, le procureur du défendeur a avisé, par
écrit, le Tribunal, le 7 octobre 1994 (i.e. avant le 10 octobre 1994,
date fixée par le Tribunal) que le défendeur avait " bel et bien reçu
les prestations indiquées aux cinq (5) premières lignes dudit
document".(P-1)
Le procureur de la poursuivante a ensuite
déposé une décision
rendue, le 25 janvier 1993, par la Commission d'appel en matière de
lésions professionnelles, par le commissaire Alain Suicco, assisté du
Dr. Michel Grimard, médecin.
Par cette décision, la Commission d'appel en
matières de lésions
professionnelles (CALP) rejetait l'appel interjeté, le 4 mars 1992,
par le défendeur à l'encontre d'une décision unanime rendue par le
bureau de révision, le 17 janvier 1992, décidant que le travailleur
n'aurait pas été victime, le 14 janvier 1991, d'une lésion
professionnelle au sens de la Loi sur les accidents du travail et les
maladies professionnelles.
Le procureur de la plaignante a déclaré que
c'était la preuve:
elle était basée sur la décision de la CALP qui était un jugement
définitif d'une instance qui avait pour mission de constater si oui ou
non, il y avait eu un accident du travail.
Selon le procureur, non seulement la conclusion
était authentique
mais les motifs basés sur des faits analysés par le commissaire
étaient aussi authentiques. Le procureur a prétendu que les faits
avaient été prouvés par un acte authentique car si l'acte, le
jugement, est authentique, les faits qui y sont constatés font partie
de cet acte et la poursuite était dispensée de faire la preuve de ces
faits devant le Tribunal. Les témoignages étaient inutiles parce que
le commissaire qui était tenu de constater les faits l'avait fait.
Le procureur du défendeur a répliqué que la
poursuivante ne
s'acquittait pas du fardeau de preuve qui était le sien. Il a souligné
qu'il était inadmissible que le Tribunal acceptât qu'un autre, à sa
place, se fut prononcé sur la crédibilité des témoins et en
particulier du défendeur. Il a rappelé que le fardeau devant le
Tribunal, siégeant en matière pénale, n'était pas le même que celui
qui avait guidé le commissaire dans un appel d'ordre administratif.
La poursuivante ayant déclaré sa preuve close,
la défense a
décidé de ne pas faire entendre de témoins.
Le procureur de la poursuivante a plaidé que le
commissaire de la
CALP avait décidé dans l'exercice de sa compétence, qu'il n'y avait
pas eu d'accident du travail; pour arriver à cette conclusion, le
commissaire avait analysé les faits et la décision était un acte
authentique qui faisait preuve à l'égard de tous. Selon le procureur,
ce que le commissaire avait pour mission de constater faisait partie
de cet acte authentique. La défense n'ayant pas contesté cet acte
authentique et l'encaissement des chèques, d'après le procureur de la
poursuivante,"cela était incompatible avec une défense d'innocence."
Le procureur a soutenu que le défendeur avait
profité d'avantages
auxquels il savait ne pas avoir droit. Il n'avait pas pris les moyens
pour éviter la commission des infractions. Le défendeur n'avait pas
donné d'explications plausibles de ses gestes.
Le procureur a incité la soussignée à avoir une
approche plus
large et à ne pas s'en tenir qu'à la conclusion de la décision de la
CALP mais a considéré qu'elle était déclarative de droit.
Le procureur a plaidé que la poursuivante
avait continué
d'envoyer des chèques au défendeur parce qu'elle n'avait pas su avant
la fin de janvier 1993, février 1993 (P-2) qu'il n'y avait pas eu
d'accident du travail. Par contre, le défendeur lui, le savait depuis
le début, qu'il n'avait pas eu d'accident du travail.
Le procureur a renvoyé le Tribunal au
"Précis de la preuve" de
Léo Ducharme. Puis il a conclu que face à la preuve établie selon les
pièces P-1 et P-2, et en l'absence d'explications de la part du
défendeur pour établir une diligence raisonnable de sa part, le
Tribunal devait le trouver coupable des 5 infractions dont il était
accusé.
Le procureur du défendeur a rappelé que le fardeau
de prouver les
infractions reposait sur l'État qui ne s'en était pas acquitté. Selon
le procureur, les constatations et les remarques du commissaire Suicco
ne faisaient pas preuve devant le Tribunal. Même si le commissaire
avait peut-être raison, le Tribunal ne pouvait pas se servir de cette
décision, ne pouvait pas tenir compte des 23 premières pages car la
preuve des éléments qui étaient contenus n'avait pas été faite devant
lui. Quelqu'un d'autre que le Tribunal avait décidé qu'il n'y avait
pas eu d'accident du travail et dans ce cas-là, il n'y aurait pas eu
fraude que pour les 5 derniers chèques mais dès le début et pour
l'ensemble des prestations reçues par le défendeur.
Le procureur a insisté que si la décision pouvait
être utilisée
dans une poursuite civile pour obtenir le recouvrement des prestations
faites au défendeur, elle ne saurait être utilisée dans un dossier au
pénal.
Le procureur a souligné que l'intention du
défendeur n'avait pas
été prouvée pour les 5 infractions reprochées. La décision de la CALP
avait été rendue le 25 janvier 1993, le défendeur avait reçu trois
chèques envoyés par la C.S.S.T. avant cette date: le 23 décembre 1992,
les 13 et 21 janvier 1993. De plus, la pièce P-2 indiquait que cette
copie de la décision avait été reçue au bureau du directeur régional
de la C.S.S.T. pour Richelieu-Salaberry, le 9 février 1993 soit 5
jours après l'encaissement du 4 février 1993. Le procureur a remarqué
qu'aucune preuve n'avait été faite quant à la date de la réception de
la décision de la CALP par le défendeur de sorte que le Tribunal
devrait avoir des doutes, quant à l'intention de celui-ci, en ce qui
avait trait au dernier chèque encaissable le 18 février 1993: quand
l'avocat représentant le défendeur avait-il envoyé la décision à
celui-ci? Le procureur a insisté sur le fait que la C.S.S.T. avait
elle-même, selon P-1, préparé le dernier chèque, le 12 février 1992
alors qu'elle savait pertinemment que le défendeur n'y avait pas
droit, lui avait-elle même écrit pour le lui dire?
Le procureur s'est demandé comment le défendeur
pouvait savoir
qu'il n'avait pas droit aux prestations puisque la C.S.S.T. continuait
de les lui envoyer. Sans parler de mauvaise foi de la part de la
poursuivante on pouvait s'interroger sur son administration.
Le procureur a répété qu'il n'y avait aucune
preuve devant le
Tribunal à l'effet que le défendeur était au courant qu'il n'avait pas
droit aux chèques que la poursuivante persistait à lui envoyer.
Le procureur a rappelé que la poursuivante
aurait pu faire la
preuve pertinente par le témoignage de ses fonctionnaires mais qu'elle
avait choisi de ne pas le faire.
Le procureur a insisté sur le droit du
défendeur de ne pas
témoigner et sur l'obligation pour le Tribunal de ne pas en tirer de
conclusion. Le défendeur n'avait pas l'obligation de s'expliquer, par
contre la poursuivante devait faire la preuve de l'intention coupable
de celui-ci, ce qu'elle n'avait pas fait. Les chefs d'accusation
spécifiaient que le défendeur savait ne pas avoir droit aux
prestations, mais, selon le procureur, la mens rea n'avait pas été
prouvée même si l'actus reus l'avait été.
Devant la défaillance de la preuve, le Tribunal
devait acquitter
le défendeur, a conclu le procureur du défendeur.
Le procureur de la poursuivante a répliqué que,
selon la "ratio
decidendi" de la décision de la CALP, il n'y avait pas eu d'accident du
travail, le défendeur était coupable de fraude depuis le début. À
partir du jour 1, de sa première demande d'indemnisation, le défendeur
s'était rendu coupable de fraude. C'était la prétention de la
poursuivante que le défendeur savait depuis le début qu'il n'avait pas
le droit de recevoir des prestations de la part de la C.S.S.T. Il
n'était pas question de dates.
Le procureur a prétendu que la question de
l'accident de travail
avait été décidée et qu'ainsi la poursuivante s'était acquittée du
fardeau d'établir que le défendeur savait ne pas avoir droit aux
prestations. Selon le procureur, les choses déjà déterminées par la
CALP ne pouvaient pas être remises en question et la preuve de tous
les éléments des infractions avait été faite.
Le procureur du défendeur a répondu que le
Tribunal ne pouvait
pas se référer aux motifs d'une autre instance qui avait reconnu
certains faits, parce que ces faits là n'avaient pas été prouvés
devant la soussignée.
Selon le procureur, le contenu d'une décision c'est
la conclusion
et non pas l'appréciation des témoins, c'est le contenu légal, le
principe de droit.
Répétant que la poursuivante ne s'était pas acquittée
du fardeau
de la preuve, le procureur du défendeur a rappelé que le défendeur
avait fait l'objet de décisions favorables de la part de la C.S.S.T.
avant la décision de la CALP.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'article 463 de la Loi sur les accidents du
travail et les
maladies professionnelles se lit comme suit:
"Quiconque agit ou omet d'agir, en vue
d'obtenir un
avantage auquel il sait ne pas avoir droit ou se
soustraire à une obligation que la présente loi lui impose
commet une infraction et est passible d'une amende d'au
moins 500,00 $ et d'au plus 2,000,00 $ s'il s'agit d'une
personne physique, et d'une amende d'au moins 2,000,00 $
et d'au plus 8,000,00 $ s'il s'agit d'une personne
morale".
Tous les chefs d'accusation spécifient que le
défendeur a
obtenu un avantage auquel il savait ne pas avoir droit(le
soulignement est de la soussignée).
Outre que les plaintes ne spécifient pas si
on accuse le
défendeur d'avoir agi ou d'avoir omis d'agir, ou les deux, la
plaignante s'est contentée comme preuve de déposer une décision
rendue par la CALP dans le domaine du droit administratif, civil. Le
procureur de la plaignante veut de plus utiliser une théorie de la
preuve en matière civile, faisant fi de toutes les règles de
procédure pénale.
Il y a lieu de souligner que le Tribunal ne siège
pas en appel
de la décision de la CALP ni en exécution de celle-ci.
Plusieurs plaintes d'infractions ont été
portées contre le
défendeur et le Tribunal siège alors en vertu de l'article 473 de la
Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles
qui édicte:
"Une poursuite en vertu du présent chapitre est intentée
devant le Tribunal du travail crée par le Code du travail
(chapitre C-27) et les articles 118, 121, 124 à 128 et 133 à
136 de ce code s'appliquent."
L'article 118 C.T, alinéa 2 spécifie:
"Poursuite pénale: Ce Tribunal a également
juridiction
exclusive, en première instance, pour recevoir la preuve
et rendre jugement lors d'une poursuite pénale intentée
pour sanctionner une infraction à une disposition du
présent Code."
(Le soulignement est de la soussignée).
Il y a lieu aussi de rappeler l'article 1 du Code
de procédure
pénale:
"1. (Application du code) Le présent code
s'applique à
l'égard des poursuites visant la sanction pénale des
infractions aux lois, sauf à l'égard des poursuites
intentées devant une instance disciplinaire."
L'article 61 du C.P.P.se lit comme suit:
"(Règles applicables en matière criminelle)
Les règles de
preuve en matière criminelle, dont la Loi sur la preuve du
Canada (L.R.C. 1985 ch.C-5) s'appliquent en matière
pénale, compte tenu des adaptations nécessaires et sous
réserve des règles prévues dans le présent code ou dans
une autre loi à l'égard des infractions visées par cette
loi et de l'article 308 du Code de procédure civile"
(Art.308 C.P. secret professionnel du fonctionnaire)
Il ne s'agit ici ni d'un certificat contenant des extraits d'un
registre tenu en vertu de la loi (art.67 C.P.P.) ni de la preuve
d'un acquittement ou de la déclaration de culpabilité d'un défendeur
ou de l'arrêt des procédures (art.69 C.P.P.).
Il s'agit d'une décision d'une commission
administrative, la
CALP, qui a décidé, selon ces propres règles (art.412 à 429 incl. de
la Loi sur les accidents du travail et les maladies
professionnelles,) de rejeter deux appels du défendeur.
Le Tribunal ne siège pas en appel de cette
décision, et la
C.S.S.T. ne poursuit pas le défendeur, devant celui-ci, pour le
recouvrement des prestations qui furent payées, selon les articles
430 à 437 incl. de ladite loi.
Le Tribunal siège dans l'exercice de sa compétence pénale. (1)
Il ne s'agit pas non plus de l'interprétation
d'un article de
la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles
dont le législateur a confié à la CALP "le pouvoir de se prononcer
de manière définitive sur le sens et la partie de l'article" en
question, comme dans l'arrêt Domtar.(2)
Alors que dans cette affaire le Tribunal du
travail devait se
prononcer sur le même texte législatif que celui qui avait fait
l'objet de l'interprétation de la CALP, la Cour suprême soulignait
"le contexte particulier de la compétence de chacun, l'un en matière
pénale, l'autre en matière administrative. Puisque ces deux matières
ont des règles de base totalement différentes..."(le soulignement
est de la soussignée).
Dans une plainte pénale, il y a un fardeau
particulier que doit
assumer la poursuite, soit celui de persuader le Tribunal, et
personne d'autre, de la culpabilité, hors de tout doute raisonnable
(celui du Tribunal) du défendeur. Cette règle issue de la common
law, qui s'applique en droit criminel doit également recevoir
application en matière pénale: elle est une règle fondamentale du
droit de la preuve pénale. En matière pénale, la règle de la preuve
n'est pas celle applicable en matière civile ou en matière
administrative, soit celle de la prépondérance de la preuve.
Comment ne pas trouver inacceptable que l'on
veuille imposer au
Tribunal une décision prise par un autre, selon des règles
différentes, et dans laquelle pour des motifs, qui sont les siens, un
commissaire a décidé de ne pas croire le défendeur? Il ne s'agit pas
dans la présente affaire, de la définition de ce qui est ou n'est pas
un accident du travail. Décidant de la crédibilité du défendeur, le
commissaire a conclu que celui-ci n'avait pas été victime d'une
lésion professionnelle.
Il appartient au Tribunal de juger dans les
présentes plaintes,
de la culpabilité ou non du défendeur, en regard des chefs
d'accusation portés contre lui, selon la preuve faite devant lui et
les règles de la procédure pénale et non pas selon la preuve faite
devant un autre et selon des règles particulières.
Les faits établis par les documents déposés, ce
qui constitue
la seule preuve faite par la poursuivante pour tous les cinq chefs
d'accusation établissent que: a) le 25 janvier 1993, la CALP a
rejeté deux appels faits par le défendeur à l'encontre d'une
première décision de la C.S.S.T. ayant décidé que la lésion du
défendeur était consolidée et d'une décision par le Bureau de
révision à l'effet que le défendeur n'avait pas subi de lésion
professionnelle le 14 janvier 1991; b) une copie de la décision de
la CALP fut reçue le
9 février 1993 au bureau régional de la C.S.S.T.-Richelieu-
Salaberry; c) la C.S.S.T. a émis des chèques au nom du défendeur, le
11 décembre 1992, les 8 janvier, 15 janvier, 29 janvier et le 12
février 1993 pour les sommes indiquées dans les chefs d'accusation;
d) le défendeur a admis avoir encaissé les chèques en question, le
23 décembre 1992, les 13 et 21 janvier, les 4 et 18 février 1993.
L'actus reus est donc prouvé et les chèques ont
été encaissés.
La décision de la CALP, rendue le 25 janvier 1993 établit que le
défendeur n'avait plus droit à des prestations puisque ses appels
avaient été rejetés.
Mais qu'en est-il de la mens rea? La question que
le Tribunal
doit se poser est celle-ci: lui a-t-on prouvé, hors de tout doute
raisonnable l'intention coupable du défendeur, a-t-on prouvé au
Tribunal que le défendeur savait ne pas avoir droit à ces
prestations, tel que le spécifient les cinq chefs d'accusation.
La seule preuve faite devant le Tribunal est que
le 25 janvier
1993, le commissaire Suicco signait sa décision rejetant les deux
appels du défendeur. Tant le défendeur que la poursuivante ne
pouvaient savoir avant le 25 janvier que le premier n'avait pas le
droit de recevoir les prestations préparées et encaissées avant
cette date. Ainsi le défendeur doit être acquitté des chefs
d'accusation portés pour le 23 décembre 1992, les 13 et 21 janvier
1993.
Qu'en est-il de l'accusation portée pour le 4
février 1993? La
pièce
P-2 indique qu'une copie de la décision a été reçue à la direction
régionale le 9 février 1993. Aucune preuve ne fut faite par la
poursuivante quant à la procédure suivie par la CALP: envoie-t-on
une copie de la décision aux seuls procureurs au dossier ou aux
procureurs et aux parties? Il y a un doute raisonnable que le
défendeur, lui aussi, comme la poursuivante, n'ait pas été, le 4
février, averti du résultat de ses appels. Par conséquent, à cause
de ce doute raisonnable, le défendeur doit être acquitté.
Reste l'accusation portant sur le 18 février
1993. Bien qu'au
courant de la décision, la C.S.S.T.a émis le 12 février 1993 un
autre chèque à l'ordre du défendeur qui l'encaissa le 18 du même
mois. Si on ne peut pas parler de mauvaise foi de la part de la
plaignante on peut s'interroger sur sa gestion. La preuve n'a pas
été faite du moment où le défendeur a su le résultat de ses appels.
À qui fut envoyée la copie de la décision? Le procureur du défendeur
a-t-il communiqué à celui-ci la décision du commissaire Suicco ?
Aucune réponse ne fut donnée au Tribunal.
Est-ce que par le seul écoulement du temps, i.e.
24 jours le
Tribunal peut présumer que le défendeur savait ne pas avoir droit à
cet avantage i.e. à ce chèque de 473,76 $. Cet élément de preuve
manque...Le Tribunal se doit donc de faire bénéficier le défendeur
de cette déficience de la preuve et lui accorder le bénéfice du
doute raisonnable.
Si, comme l'a prétendu le procureur de la
plaignante, le
défendeur a fraudé celle-ci depuis le début et a bénificié
illégalement de plusieurs milliers de dollars de prestations
auxquelles il n'avait pas le droit, la C.S.S.T. devait en faire la
preuve devant le Tribunal, ce qu'elle n'a pas fait.
Vu la déficience de la preuve faite,
Le Tribunal se doit de rejeter les 5 chefs
d'accusation, tels
que libellés, portés contre le défendeur et de prononcer un jugement
d'acquittement.
Le jugement est déposé au Greffe du district
d'Iberville.
LISE LANGLOIS, J.C.Q.
Membre du Tribunal du travail
J U R I S P R U D E N C E
1) C.S.S.T. c. Lacasse Entreprises Inc.
T.T.500-29-001237-89
Le 27 mars 1990- M. le juge Claude Saint-Arnaud
2) Roland Lapointe c. Domtar Inc. & Als
(1993)- 2- S.C.R. page 756 et suivantes)
F0245.TXT
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